Essayage

Auteur : Helios
E-Mail : helios14@free.fr
Catégorie : scène manquante à la guimauve
Saison : 8, entre Reckoning (la dernière chance) et Threads (pour la vie)
Raiting : aucun
Date d’écriture : août 2005

Archive : à ne pas publier sans mon autorisation (envoyez-moi un email je dirai sûrement oui).
Disclamer : Stargate is a register trademark of MGM/UA and showtime-online. I’m not intending to discredit the actors, writhers or anyone involved with Stargate. It is purely a fan fiction and nothing else. This story is not making any profit, it is strictly for entertainment.

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J’ai chaud. J’ai si chaud. J’ai comme un voile gris devant les yeux. Respirer à fond, trouver l’air.
Regarder dans la glace.

Elle est superbe. C’est exactement ce que je voulais. Ce que j’ai toujours voulu en fait. C’est juste… je ne sais pas… Un malaise diffus, une impression qu’elle ne devrait pas être là, sur moi…

- Elle est splendide Sam.

Je souris à Cassi. Cassi qui me regarde avec des yeux de petite fille émerveillée dans son corps de jeune femme. Elle est sagement assise à côté de l’imposant miroir en pied, en jean avec le petit pull blanc que je lui ai offert à Noël. Ses cheveux châtains tombent en cascade sur ses épaules fines. Elle me fait toujours tellement penser à Janet, qui n’était pourtant pas sa vraie mère. Il faut croire qu’elles étaient faites l’une pour l’autre malgré tout. Mon Dieu que le temps passe vite….

Trop vite….

Respirer, profondément. C’est normal d’être si nerveuse. Ce n’est quand même pas tous les jours qu’on essaye une robe de mariée. SA seule et unique robe de mariée.

Mais l’image que me renvoie le miroir… la robe est superbe. Alors pourquoi je ne me sens pas….

C’est l’habitude. Voilà, sûrement l’habitude. Je ne passe mes journées que vêtue de treillis informes, alors forcément le contraste me choque. Me gêne. M’empêche de respirer. C’est ça. C’est sûrement ça. Arrêter de réfléchir et ne pas chercher plus loin, c’est sûrement ça.

- SAMANTHA CHERIE VOUS ETES DIVINE !!!!!!!!!!!!

Ça…. Et elle. J’ai vraiment…. Un problème avec sa voix. Aigue et tonitruante à la fois.

- Une vraie poupée Barbie !!!!!!!!!!

J’ai aussi un problème avec ce qu’elle raconte, c’est vrai. Comme on dit, le mariage, c’est pas la mer à boire, mais la belle-mère à avaler. Pathétique mais tellement réaliste en l’occurrence.
Ne surtout pas oublier de sourire, elle va quand même être ma belle-mère à vie. Et comme Pete l’adore, aucune chance de pouvoir espérer rater le gigot du dimanche midi.

Les joies du mariage, je suppose.

Je ne sais même plus pourquoi elle est venue à l’essayage… ah si, je sais, parce qu’elle ne m’a pas demandé mon avis. Voilà.

- Moi, à mon mariage avec le père de Pete, j’avais une robe un peu moins sobre quand même. Ça manque de volants tout ça, mais bon, c’est votre choix…. Vous êtes vraiment sûre pour les perles sur le voile ??
- Oui, vraiment, et souvenez-vous, je préfère sans voile….

Elle se renfrogne. Bien tenté, mais tu ne m’auras pas comme ça.

- Ah oui, c’est vrai…. Une mariée sans voile… Enfin ce que j’en dis moi…. Mais bon, c’est votre mariage…. L’important, c’est que mon fils soit heureux ! Quand je pense à cette Emilie, combien elle a pu le faire souffrir, alors que je savais depuis le départ qu’elle ne le méritait pas…. et….

Et c’est reparti sur l’ex femme de Pete. Je soupire imperceptiblement et Cassi me sourit d’un air désolé.
La robe tombe bien. Je ne pense pas qu’il y ait beaucoup de retouches à faire. Tant mieux. Il faudra s’occuper des fleurs dans quelques jours, Pete n’arrête pas de me tanner avec ça.

Bon Dieu, un mariage est plus difficile à organiser qu’une rencontre entre les 4 races ma parole !!!!

Pourquoi est-ce que je suis si pâle dans ce miroir ? Pourquoi ce nœud dans mon ventre et cette boule dans ma gorge ? Me calmer, respirer….

Il faut que je sorte.

- Excusez moi une minute, je voudrais juste prendre un peu l’air…. toute seule, ai-je ajouté en voyant le geste de ma future belle-mère.

La vendeuse me répond :
- Oui, oui bien sûr, aucun problème.
- Merci.

De l’air, mon dieu vite de l’air. Je traverse la boutique en deux enjambées et pousse la porte vitrée pour me retrouver sur le trottoir. Je ferme les yeux et je respire à fond. Je sens enfin le soleil sur ma peau. Que c’est…

- Carter ???

MON DIEU.

J’hésite une fraction de seconde à ouvrir les yeux…. Alors que je sais parfaitement qui je vais voir….

Il est devant moi, dans son uniforme bleu, sa casquette à la main. Figé. Soudain presque pâle. Le général Jack O’Neill.

Et moi je suis là, sur le trottoir, avec tous ces gens qui nous dévisagent en passant. Forcément, un général de l’US Air Force et… une mariée, ça ne passe pas inaperçu.

Pour le coup je ne respire plus du tout.

Je ne sais pas combien de temps nous sommes restés parfaitement immobiles et silencieux, tétanisés. Il se racle soudain la gorge en se passant rapidement la main dans les cheveux. Mon cœur se serre un peu plus.

- Euh… J’ai raté quelque chose ? Je croyais que le mariage était dans un mois pourtant….

Ce poids disparaît de ma poitrine comme à chaque fois qu’il sourit et qu’il me fait sourire.
- Non, non, c’est bien ça mon général….Je suis… en plein essayage.
- Sur le trottoir ?

Je n’arrive jamais à savoir si le voir me tend ou me détend. Un peu des deux à la fois.

- Non, j’avais juste… Besoin de respirer un peu. C’est étouffant là-dedans.
- Ah.

Le silence s’installe à nouveau. Je fronce soudain les sourcils :
- Mais et vous mon général ? Que faites-vous ici ?
- Je profite de la pause déjeuner pour faire….

Il semble mal à l’aise soudain. Il cherche ses mots. C’est rare.

- … une petite course en ville. Je sors de la réunion avec… nos invités que vous savez. Je vous raconterai plus tard.
- Oui.

Nous nous regardons en souriant. Forcément, il serait assez mal venu qu’il m’explique maintenant, en pleine rue, les avancées du traité entre la Terre et le peuple de P5X455. Ses traits sont calmes et tristes à la fois. Une lueur mélancolique brille dans ses yeux bruns. Il murmure soudain :
- Vous êtes…. très belle.

Un frisson me parcourt alors que mon cœur se met à battre à tout rompre dans ma poitrine. J’arrive à balbutier :
- Merci mon général….

Cette situation est atroce. Ce nœud dans mon ventre est atroce. Cette tristesse dans son regard….

- Sam, tu…. JACK !
Nous nous retournons tous les deux et Cassi se jette presque dans les bras du général qui sourit en l’embrassant.

Comme je voudrais pouvoir faire cela…..

- Ah bah ça alors, pour une surprise !!!! Mais que…. ?
- Une course en ville…. Et toi, t’acquittes-tu bien de ton rôle de demoiselle d’honneur ?

Je réponds pour elle :
- A merveille !!

Cassi me gratifie d’un sourire plein de fierté. Mais celui-ci s’efface comme par enchantement quand elle réalise la situation dans laquelle nous nous trouvons. Son regard inquiet passe rapidement de Jack, qui tourne sa casquette entre ses doigts, à moi, qui m’efforce de sourire maladroitement.

- Samantha, que faites-vous dehors enfin ??

Jack hausse les sourcils et la mère de Pete ralentit en l’apercevant. Je tente d’expliquer :
- Edna, permettez moi de vous présenter….
- Vous êtes le général, le père de Samantha, c’est ça ??

J’en reste sans voix. Jack a pali et les commissures de ses lèvres se sont imperceptiblement baissées. Cassi lève les yeux au ciel. Je me précipite pour expliquer :
- Mais non, pas du tout ! Voici le général O’Neill, mon supérieur… et ami.

Jack tend la main en souriant poliment. J’ai rarement vu autant de tristesse dans ses yeux. Mais je suis, comme toujours, la seule à le voir quand Daniel et Teal’C ne sont pas là.
J’ai envie de hurler, de lui crier à elle qu’elle est vraiment stupide, de lui crier à lui qu’il est magnifique, qu’il est bien trop jeune pour être mon père, qu’il pourrait très bien….

Mais je me tais. Comme toujours.

Edna le dévisage avec envie…. Tiens, manifestement, pour elle, elle ne le trouverait pas trop vieux….

- Enchantée, je suis Edna Shanahan, la mère de Peter !
- J’aurais deviné. Enchanté, répond doucement Jack. Bon, et bien si vous voulez….
- Mais non, mais non, vous allez bien rester avec nous quelques minutes ? Nous avons presque fini ! Un avis masculin serait parfait !

Jack écarquille les yeux, soudain…. Terrifié. Oui. Terrifié. Cassandra est bouche bée. Je balbutie, affolée :
- Non non Edna, le général est sûrement très occupé, je ne crois pas que…
- Taratata ! Vous m’avez dit que c’est un ami, il peut bien nous aider une minute !!!

Elle entraîne derrière elle un Jack étrangement passif tout à coup. Et muet. Cassi et moi échangeons un coup d’œil et nous précipitons à leur suite.

Cet essayage est une catastrophe. Je retrouve Jack planté dans la boutique, qui me lance un regard désespéré. Mon reflet, renvoyé par un des nombreux miroirs de la pièce, est livide. Cassi se mord nerveusement la lèvre.

Edna et la vendeuse ne se rendent compte de rien, ne savent rien, ne voient rien. Rien de ce malaise palpable, de cette tension extrême. Ne remarquent pas que Jack et moi nous fuyons désespérément du regard. Pour une fois.

Je suis à nouveau plantée devant la glace alors que j’ai envie de courir vers la cabine d’essayage la plus proche pour renfiler mon jean. Je ne sais plus où regarder…. Moi qui suis livide, tremblante, dans cette robe tout à coup si lourde sur mes épaules. Jack qui enfonce ses ongles dans sa casquette et qui s’efforce de sourire et de garder ce masque impassible quand je lis dans ses yeux bruns bien plus de peine que je ne veux me l’avouer. Ou Cassi qui semble sur le point de gifler ma future belle-mère.

Je serre les poings pour ne pas trembler. J’entends leurs voix, irréelles et pourtant enjouées.

- Alors, général, qu’en pensez-vous ? Je suis certaine que vous êtes homme de goût !

Je croise le regard de Jack. Un hurlement meurt dans ma gorge nouée. Il répond d’une voix étrangement paisible et si horriblement sincère :
- Elle est magnifique.

Mes lèvres tremblent des sanglots que je tente de toutes mes forces de retenir.

- Je suis sûre que Peter aimera ! Mon fils en a de la chance d’épouser une si jolie jeune femme !
- Votre fils a beaucoup de chance, Madame Shanahan.

Sa voix et son regard me transpercent de part en part. Je me mords violemment la lèvre. Je sais qu’il voit les larmes tout près dans mes yeux. Il les a toujours vues.

Je me dis que cela va cesser. Je me dis que cela ne peut pas être pire. J’ai tort.

- Samantha, votre père est général aussi, non ?
- Oui.
- Il portera cet uniforme vous croyez ?
- Je pense oui !
- Merveilleux ! ce sera du plus bel effet pendant la cérémonie ! Regardez un peu comme vous serez magnifiques en remontant l’allée !

Et, riant toujours avec la vendeuse, Edna invite légèrement Jack à se tourner. Il se laisse faire sans réfléchir, sans me quitter des yeux.

Et se retrouve à mon côté face au miroir. Face au miroir qui renvoie l’image impossible d’une Samantha Carter en robe de mariée aux côtés d’un Jack O’Neill en uniforme d’apparat.

Nous ne bougeons pas. Nos regards sont rivés l’un à l’autre dans le reflet alors que les deux femmes se félicitent mutuellement de l’effet visuel qui rendra tellement bien sur les photos.

Ce reflet nous projette tous deux dans le souvenir d’une photo, cinq ans auparavant. Une photo plus ou moins identique à ce que nous voyons. Une photo où ce n’était pas nous, pas vraiment nous. Mais une photo au moins où le bonheur se lisait sur les visages.

Alors que là nous sommes aussi livides l’un que l’autre. Désespérés. Terrifiés.

Et soudain étrangement détendus. Un sourire pâle naît quasiment au même instant sur nos lèvres. Le besoin de profiter d’un instant volé qui ne reviendra jamais. Jack replie le bras et je passe ma main sur le tissu de sa veste. Il ramène son autre main et la pose sur la mienne. Et à l’instant où je presse très légèrement mes doigts sur son bras, je sens les siens serrer ma main. A peine. Un frôlement imperceptible.

Et nous regardons en souriant ce reflet qui ne sera jamais vraiment le nôtre. Et mon regard passe sur Cassi qui retient ses larmes et sourit, elle aussi.

Un instant. Une éternité.

Une sonnerie de téléphone.

Jack lâche doucement ma main et saisit son portable dans la poche de sa veste d’uniforme. Il regarde l’écran et soudain se détache de moi et s’éloigne.

Voilà, l’instant est passé.

Ne reste que son dos que je distingue dans le miroir et sa voix.
- Oui, je sais, je te rejoins.

Je réalise que la vendeuse est en train de mettre des épingles sur le bas de ma robe en papotant toujours avec la mère de Pete.

Pete….

Jack se retourne et revient vers nous, mais son regard fuit le mien.

- Excusez moi, je dois vous laisser. Cassi, Carter, Madame Shanahan….

Et il disparaît.

Je croise le regard étonné de Cassandra. J’attrape le bas de ma robe, ignorant le cri de protestation de la vendeuse qui répand au sol toutes les épingles.

Je sors du magasin en hurlant presque :
- Mon général !!!!

Sa foulée reste en suspend, il hésite, il se retourne. Nos regards se croisent une fois de plus. Son sourire est soudain si amère :
- Carter, c’est une habitude chez vous les essayages sur le trottoir ?
- Je suis désolée.

C’est sorti comme ça. Du plus profond de mon cœur. Je lis la surprise, l’hésitation dans ses yeux. Alors je forme les mots, un à un, difficilement :
- Je ne suis pas désolée pour ça… Enfin… Si …. Mais je suis désolée…. Pour tout. Tellement désolée pour tout.

Son regard est soudain plus chaud, son sourire plus doux. Et sa voix comme un murmure :
- Je sais. Moi aussi.

Il amorce un geste pour partir, puis me lance :
- Vous êtes la plus belle des mariées Sam. Cette robe est faite pour vous.

Et il disparaît dans la foule.

Je ferme les yeux, respire profondément, et je suis soudain plus calme. Plus sereine. Je rentre et me plante à nouveau dans le miroir. J’annonce d’une voix qui, je le sais d’expérience, ne permettra aucune contestation :

- Je vais enlever la robe. Je veux un autre modèle. Avec un voile. Et des perles.

Et, sous les regards ahuris de Cassi et de la vendeuse, je passe devant une future belle-mère radieuse et rejoins la cabine d’essayage.

FIN