Moi, Mary
Auteur : Helios
E-Mail : helios14@free.fr
Catégorie : aucune idée. Romance entre autres.
Saison : saison 9
Raiting : aucun
Date d’écriture : octobre 2005
Archive : à ne pas publier sans mon autorisation (envoyez-moi
un email je dirai sûrement oui).
Disclamer : Stargate is a register trademark of MGM/UA and
showtime-online. I’m not intending to discredit the actors, writhers or
anyone involved with Stargate. It is purely a fan fiction and nothing else.
This story is not making any profit, it is strictly for entertainment.
Notes : merci à Josette, qui m’a inspiré
le personnage de Mary, même s’il y a peu de chance qu’elle
le sache un jour !
Un gros bisou à mes deux fidèles relectrices qui sont toujours
là pour me prodiguer leurs conseils et qui attendent avec une patience
infinie que je daigne leur envoyer la suite, parfois des jours plus tard…..
Je pense à vous les filles.
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Je m’appelle Mary Matheson. Je suis assistante de direction au Pentagone, au département du Home World Security. Et voilà maintenant plus de huit mois, j’ai fait une rencontre exceptionnelle.
Je m’en souviens comme si
c’était hier. La nouvelle s’est répandue comme une
traînée de poudre : IL avait été nommé à
la tête du Home World Security à la place du général
Hammond, IL serait là d’un jour à l’autre.
LUI. Le général Jack O’Neill. L’ancien leader de SG1,
puis commandant du SGC dans le Colorado. L’homme qui sauvait la planète
tous les quatre matins d’un désastre intergalactique.
Inutile de vous préciser qu’il était l’unique sujet de conversation autour de la machine à café. Les fantasmes les plus divers courraient sur lui. On s’accordait à le voir comme un monstre sacré inaccessible, secret, d’une intelligence rare et d’un militarisme exacerbé. Bref, un grand comique.
Certaines se pâmaient d’avance à l’idée de l’approcher. Il faudrait bien lui trouver un assistant, à ce monsieur. Sarah Gallahan était sur les rangs, prête à brandir ses nombreux diplômes et sa plantureuse poitrine. Son ancien patron venait de partir en retraite, elle était toute désignée pour le poste. Elle me faisait rire, survoltée à l’idée de devenir l’assistante du Général O’Neill. Je pense que Monica Lewinski devait être aussi excitée quand elle a décroché son stage à la Maison Blanche.
Bref, les jours ont passé,
il est arrivé d’après ce que j’ai appris, et les choses
se sont gâtées.
Je ne l’ai pas croisé. Il faut dire que tout est démesuré
ici, et évidemment il avait autre chose à faire qu’errer
dans les couloirs. Il était toujours entre la Maison Blanche et le Congrès,
parfois dans son bureau mais c’est tout.
Sarah est arrivée à la cafétéria un midi, s’est
assise avec nous et s’est mise à hurler. Je ne vois pas d’autre
mot.
Ce type était un taré. Un misanthrope. Un militaire borné
et stupide. Le gars le plus odieux de tout ce bâtiment, et pourtant dieu
sait s’il y en a.
Bref, elle était virée. Ou plutôt, pas engagée. La
demoiselle avait été renvoyée dans ses 22 mètres
après deux jours d’essai au cours desquels, comble du tragique,
il n’avait pas même accordé un regard à son décolleté.
Ce Jack O’Neill m’était soudain devenu sympathique.
Et ça a continué. Elles ont été plusieurs à défiler. Ils lui ont même envoyé des militaires, se disant que le contact passerait peut-être mieux. Rien à faire. Un mur. Impossible de bosser avec lui à priori.
Tous s’accordaient sur deux choses : ce type n’avait rien à faire au Pentagone, et était très bien conservé pour son âge.
Puis un matin mon patron m’a
faite appeler, bien énervé. C’était le Directeur
Bommers, glacial et autoritaire, mais au moins carré dans son travail.
- Madame Matheson, il parait que je dois me séparer de vous.
- Pardon Monsieur ??
- J’y suis contraint, a priori on veut vous envoyer à l’essai
chez ce O’Neill.
- Le général O’Neill ?
- Oui. Il commence à me courir celui-là. Il a Hayes dans sa poche,
alors on lui passe tous ses caprices. Et moi, évidemment, je n’ai
pas mon mot à dire ! Bref, de toutes façons il paraît qu’il
ne supporte personne, je mets ma main à couper que vous serez de retour
dans 3 jours. D’ici là mettez les dossiers à jour, je me
débrouillerai. Vous avez rendez-vous avec lui lundi à 9 heures.
- Bien Monsieur.
Avec le recul, je me demande s’il se l’est vraiment coupée, la main.
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Bref, le lundi suivant, à 8h57, je me présentai à son bureau.
Il n’était pas arrivé. A 9 heures non plus. A 9h10 non plus.
A 9h20 je me suis versé un café. A 9h40 j’étais confortablement
assise dans l’épais fauteuil de l’anti-chambre.
Après tout, il était peut-être en train de sauver le monde,
et moi j’avais du café, un dossier moelleux et rien à faire.
Pourquoi se plaindre ?
A 9h45 la porte s’est ouverte et il est entré.
En effet, la première chose qui m’est passée à l’esprit, c’est qu’il était fichtrement bien conservé. Très grand, mince, athlétique. Des gestes à la fois rapides et souples. Un visage fin et délicieusement marqué par l’âge, le soleil et l’armée. Des yeux bruns magnifiques et profonds. Des lèvres minces et serrées.
Une voix chaude et décidée.
- Ah, oui, c’est vrai, vous
êtes….
- Votre rendez-vous de 9 heures, Mary Matheson.
J’ai dit cela en souriant, je ne voulais pas qu’il le prenne comme
un reproche. Il a légèrement froncé les sourcils :
- Désolé, je ne me suis pas réveillé.
J’étais soufflée. Je m’étais attendue à tout : une urgence des Asgards, une quarantaine au SGC, un golf avec Hayes…. Mais vraiment pas ça. Et pas qu’il me l’annonce tranquillement.
Ce type était odieux, j’adorais.
- Je vais me chercher un café,
installez-vous.
- Monsieur, je peux aller vous le…
Il était déjà
reparti. J’ai soupiré, jeté mon gobelet vide dans la poubelle
et suis entrée dans son bureau. Sublime, bien sûr. Bommers en aurait
fait une jaunisse.
Une immense baie vitrée donnant sur le parc intérieur. Un gigantesque
bureau et trois tables de travail. Des fauteuils. Un vidéo projecteur.
Deux photos et une plante verte.
Ne l’entendant pas revenir,
je me suis penchée pour observer les cadres. On apprend beaucoup sur
quelqu’un en regardant ses photos. Un jeune garçon, souriant, un
gant de base-ball à la main. Il devait avoir dans les dix ans. Et une
équipe SG. SG1 sûrement, mais je n’ai pas eu le temps de
voir, j’ai entendu la porte de communication s’ouvrir et j’ai
juste pu me redresser avant qu’il entre à son tour, un gobelet
fumant à la main.
- Je vous en prie, asseyez-vous.
Nous nous sommes installés tous deux. Il a soupiré, a fouillé
dans une pile de dossiers, en a sorti un qui devait être le mien, l’a
ouvert, pas regardé, a soupiré à nouveau, l’a refermé,
s’est enfoncé dans son fauteuil, a bu une gorgée de café,
m’a jeté un regard blasé et a dit :
- Ecoutez, je suis désolé qu’on vous fasse perdre votre
temps. Je n’ai pas besoin de vous.
- Moi non plus, j’ai déjà un patron. Mais a priori on tient
à ce que vous ayez une assistante.
Vus les responsabilités du Monsieur, son emploi du temps que j’imagine bien, et le désordre qui règne sur sa table de travail, je peux deviner pourquoi.
Il a très légèrement
froncé les sourcils et m’a observée plus attentivement.
Il a un regard très pénétrant, déstabilisant. Mais
chaud en même temps. Je n’ai pas baissé les yeux. Je n’ai
pas souri. J’ai attendu la suite.
- Les dossiers m’ennuient. Parlez-moi de vous.
- Alors… J’ai fait des études de lettres et archéologie
à Stenford….
Une lueur s’est allumée dans son regard. Pas un muscle de son visage n’a bougé.
- …. puis je me suis retrouvée
assistante de direction par un concours de circonstances. J’ai continué,
suis entrée au Pentatone il y a plus de dix ans et je travaille au Home
World Security depuis trois ans. J’ai évidemment les compétences
habituelles requises. Voilà.
- Bon.
Il m’observait toujours. Je
savais qu’il n’essayerait pas de me dicter un texte à toute
allure, de tester ma connaissance de trois langues et autres. Ce type-là
s’en moquait complètement. Et m’intéressait beaucoup.
Il a demandé :
- Que savez-vous de moi ?
- Rien. Ce que j’ai entendu des collègues qui sont passées
avant moi.
- Et ?
Je le sentais amusé même
s’il ne souriait toujours pas. Il avait cessé de tapoter du doigt
la surface lisse de son bureau. Le téléphone a sonné. Cela
aurait pu être la Maison Blanche mais il n’a pas décroché.
Quand l’appel eut été rebasculé sur le standard,
il a redemandé, d’une voix douce :
- Et ?
- Vous êtes froid, en retard, mal organisé.
- C’est tout ?
- Je préfère taire le reste si vous me le permettez, Monsieur.
- Je suis déçu, c’est très en dessous de la vérité.
Et vous voudriez travailler avec quelqu’un comme ça ?
- Je suis mariée depuis trente ans et mon époux passe pour odieux.
Je ne suis donc pas plus impressionnée que ça. Comme je vous l’ai
déjà dit, j’ai déjà un travail ici, je n’ai
pas besoin de vous. J’ai été envoyée ici ce matin
car a priori c’est vous qui avez besoin de moi, ou de quelqu’un
d’autre.
- Et finalement, vous voudriez essayer ?
J’ai haussé un sourcil. Je fais toujours ça quand je suis surprise. Mes filles ont toujours essayé de m’imiter sans jamais y parvenir.
Alors il a souri. Franchement. J’allais
ouvrir la bouche pour répondre mais il m’a devancée :
- Mauvaise nouvelle pour vous : vous êtes engagée.
J’ai mis des mois à comprendre pourquoi.
La seconde d’après,
il a enchaîné :
- Bien. Donc à partir de maintenant je vous appelle Mary, et vous m’appelez
Jack.
- Mais Monsieur…..
- Rhhhhhhhhhha !
J’ai réprimé
un éclat de rire devant sa réaction épidermique. Il a continué,
manifestement heureux de m’avoir faite sourire :
- Cela vous dérange que je vous appelle Mary ?
- Non, du tout, mais….
- Tant mieux. Et moi cela me dérangerait que vous ne m’appeliez
pas Jack. Donc c’est réglé.
J’ai appris à le connaître.
Enfin, à connaître ce qu’il a bien voulu me laisser découvrir.
Jack O’Neill est en effet un mur, mais un mur de protection. Je devine
beaucoup de sentiments en lui, de souvenirs, d’émotions. Profondément
enfouis et dissimulés.
Charlie déjà. Je n’ai rien demandé. C’est lui
un jour qui a vu mon regard glisser sur la photo alors qu’il me dictait
une lettre. Il s’est arrêté et m’a regardée.
J’ai posé mon stylo et attendu qu’il parle. Il a demandé
d’une voix étonnamment douce :
- Vous avez des enfants ?
- Oui. Deux filles. Des jumelles. Elles ont 27 ans. L’un d’elles
est mariée, j’ai deux petits-fils.
Un sourire triste est passé sur son visage et ses yeux bruns se sont
posés sur la photo. Il a juste dit, d’un ton parfaitement neutre
:
- C’est mon fils unique, Charlie. Il est mort quand il avait neuf ans.
- Je suis désolée.
- Je sais.
Et il a repris la lettre où il l’avait laissée.
La guerre, ensuite. Enfin, les guerres plutôt. Il a du en faire beaucoup, même certaines dont nous n’aurons jamais connaissance je pense. Il en a gardé des cicatrices, nombreuses et douloureuses. Elles lui ont aussi donné, étrangement, une grande part d’humanité. Quand il envoie des hommes au combat, il sait de quoi il parle et ne le fait jamais à la légère, mais en dernier recours. Il m’a avoué l’avoir appris au SGC. Je crois qu’avant il était plus dur, plus cruel même. Je crois qu’il pourrait encore l’être si ceux qu’il aime étaient en danger.
Pour ce qui est du quotidien, en
fait, travailler avec lui est un bonheur une fois qu’on a compris qu’il
ne faisait rien de tout ce qui pouvait toucher de près ou de loin à
l’organisation. C’est un gosse, il le sait, et il en joue. Il adore
ça. Il adore que je le poursuive dans le couloir pour lui arracher une
signature. Il adore me regarder inventer une excuse au téléphone
quand il ne veut pas prendre un appel. Il adore arriver en retard.
Je décale l’heure de ses rendez-vous, je les lui annonce toujours
15 minutes avant l’heure réelle. Il le sait et ça l’amuse.
Étrangement, quand c’est vraiment important, il est extrêmement
ponctuel.
Il est considéré ici
comme un misanthrope. C’est totalement faux : il adore les gens, il déteste
seulement les politiciens. C’est vrai que ici, il ne reste pas grand monde.
Il n’a pas les mêmes priorités, c’est tout. Et c’est
une excellente chose. J’ai l’impression de travailler avec la seule
personne qui se pose les bonnes questions.
Au quotidien il est…. j’allais
dire charmant…. Bon, vous le verriez arriver le matin, vous vous diriez
que ce n’est pas vraiment le terme adéquat. Il traverse le couloir
à grandes enjambées, répondant évasivement à
ceux qui le saluent, sans accorder un regard à personne, ses cheveux
grisonnants en bataille et la cravate à la main.
Il suffit de savoir qu’il n’a pas eu son café, c’est
tout. J’ai demandé à Paula et Gwen, à l’accueil,
de me prévenir tous les matins dès qu’il entre dans le bâtiment.
Comme ça j’ai 5 bonnes minutes pour lui faire son café et
l’accueillir avec un mug fumant. Il me rend alors le plus merveilleux
des sourires.
J’ai eu son ancien…
assistant en ligne une fois. Le sergent Harriman. Il avait un message du général
Landry. Quand je me suis présentée au téléphone,
il y a eu un silence, puis le sergent m’a dit :
- Vous êtes son assistante ?
- Oui.
- Condoléances.
- Pourquoi ?
- Au SGC c’était moi.
- Ah.
- Il est toujours…
- Épuisant ?
- Oui, voilà !
- Tout à fait. Et passionnant également.
- Oui. Il nous manque ici. Le général Landry est parfait, hein,
mais…. Il nous manque.
- Je veux bien le croire.
Il y a eu un silence, puis le sergent m’a expliqué l’objet
de son appel.
Jack O’Neill laisse toujours une trace de son passage quelque part.
En fait pour une assistante c’est
le poste idéal. Pour moi, en tous cas. Je fais tout comme je l’entends.
J’organise tout à ma convenance. Et il m’en est infiniment
reconnaissant. Quand il a une critique à faire, il la formule clairement,
les yeux dans les yeux, puis passe à autre chose. Il est d’une
franchise désarmante. Plusieurs bureaucrates ici en ont douloureusement
fait les frais. Tant mieux.
Il déteste les longs discours. Les phrases longues, le style ampoulé,
tout cela l’ennuie. Il aime quand les gens vont au fait, sélectionnent
les informations, les transmettent clairement. C’est très militaire,
mais là encore ça me convient. On parle à la fois peu et
beaucoup : en peu de mots il fait passer beaucoup de choses.
Il peut faire taire d’une phrase le plus prolixe des politiciens.
A l’inverse, un compliment de sa part vaut de l’or.
Il est très sensible, en fait : il sait taper où ça fait
mal, il sait aussi toucher quelqu’un là où cela va faire
le plus plaisir.
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Il déteste le téléphone. Je suis, je crois, une des rares
personnes à qui il répond toujours. Il sait aussi que je ne le
dérange jamais pour rien.
Hayes, bien sûr. Encore que parfois cela lui casse profondément les niktas, comme il le dit lui-même. J’ai utilisé son expression une fois pour le faire sourire, ça a marché. Il m’a juste dit que cette expression n’était pas vraiment à sa place dans la bouche d’une dame de ma qualité ( !).
Le général Landry, bien sûr. Ce sont des amis de longue date, mais surtout Jack est toujours très concerné par ce qui peut arriver au SGC. Il ne rechignera jamais à lire un des rapports de mission. Un mélange de nostalgie et d’inquiétude, je crois.
Le général Hammond, toujours. Ils ont une profonde affection l’un envers l’autre. Ils se voient régulièrement à Washington. Jack a loué un deux pièces tout près du Pentagone (ce qui ne l’empêche pas d’être en retard, loin de là). Chaque week-end il rentre chez lui, à Colorado Springs. Et en semaine, quand il sort d’ici avant 23 heures, qu’il n’a pas un dîner, un cocktail, une conférence, il dîne chez le général Hammond. Il y a presque une relation filiale entre eux. Jack a pour lui un respect qu’il n’a pour personne d’autre.
Et SG1. Le colonel Carter, Daniel
Jackson, et Teal’C, même si ce dernier n’a appelé qu’une
fois en huit mois ! J’avais pu depuis voir la photo sur son bureau. On
les distinguait mal. Ils sont tous les quatre assis dans un champ de ruines,
en treillis militaires. Teal’C était très grand, avec une
carrure impressionnante. Daniel Jackson avait l’air plus jeune, plus fluet
aussi, avec de petites lunettes fines. Le colonel Carter n’est pas très
visible, on la devinait jolie, blonde.
Quand je lui passe l’un des trois au téléphone, j’entends
son sourire dans sa voix. Ce sont les seuls coups de fils qui peuvent durer.
Les seuls aussi pour lesquels il venait fermer la porte de communication entre
mon bureau et le sien, qui normalement reste toujours ouverte. Maintenant, c’est
moi qui referme le lourd battant en souriant. Il est alors debout, devant la
vitre, et regarde dehors tout en parlant doucement.
Ils sont bien plus que ses amis. Ils sont sa famille.
Enfin, j’étais encore très en dessous de la vérité quand je pensais ça.
Et puis un jour, un matin, alors
qu’il était dans son bureau (on a eu de la chance !), une femme
est entrée dans le mien.
Elle devait approcher de la quarantaine, mais ses traits fins n’étaient
absolument pas marqués. On devinait sous son tailleur militaire bardé
de médailles un corps fin et musclé à la fois. Elle avait
un port de tête altier sans être hautain, et un sourire adoucissait
encore un visage auréolé de cheveux blonds.
Elle était tout simplement superbe. Elle a dit, d’une voix calme
et assurée :
- Bonjour, je suis le colonel Carter. Vous devez être Mary Matheson ?
- Oui, enchantée colonel. Vous voulez voir le général je
suppose ?
- S’il est là, oui.
J’ai vu passer une lueur d’inquiétude dans ses magnifiques
yeux bleus. Je me suis empressée de la rassurer :
- Il est là. Il ne vous attend pas ?
Ses joues ont rosi comme celles d’une petite fille heureuse :
- Non. Il ne sait pas que je suis à Washington.
Je n’ai pas fait le moindre commentaire, je me suis penchée vers
l’interphone :
- Le colonel Carter est ici.
- Le…
L’interphone s’est tu aussi vite qu’il s’était
allumé. Une seconde après (je ne saurai jamais comment il a traversé
son immense bureau aussi vite), il ouvrait la porte.
Alors j’ai compris. Immédiatement. A la seconde même où
je les ai vus poser le regard l’un sur l’autre. C’était
une évidence. Jack a souri comme je ne l’avais jamais vu sourire.
Il a dit d’une voix cependant parfaitement neutre :
- Carter.
- Mon général, a-t-elle répondu avec un sourire éblouissant.
- Si vous voulez bien vous donner la peine, a-t-il ajouté en la laissant
passer.
C’était un jeu entre eux. Elle est passée devant lui, à
quelques centimètres, et le regard qu’ils ont échangé
m’a faite frissonner.
La porte s’est refermée. J’ai bloqué tous les appels
pour lui.
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L’entrevue n’a pas été bien longue, en fait. Il a
ouvert la porte et l’a galamment faite passer devant lui. Ils semblaient
tous deux si calmes, si parfaitement sereins. Si merveilleusement assortis également.
Il a légèrement penché la tête sur le côté
:
- Bon, et bien bon courage pour votre réunion.
- Merci mon général. Et donc….
- … je vous retrouve ce soir.
Le colonel Carter s’est rapidement mordue la lèvre, lèvre
légèrement plus humide qu’à son arrivée d’ailleurs…
Elle a répondu sur un ton parfaitement professionnel cependant :
- Très bien. Merci mon général, à ce soir.
- A ce soir Carter.
Elle m’a saluée d’un
sourire, je lui ai rendu un signe de tête. Puis elle est sortie, d’un
pas souple et décidé. Jack a regardé un bref instant la
porte à nouveau close puis a semblé se souvenir de mon existence
et m’a dit, avec sa moue boudeuse la plus craquante :
- Euh… Mary, pour le cocktail prévu avec le général
je ne sais plus qui…..
- Je vais appeler pour annuler.
Puis j’ai baissé les yeux vers mon écran, et simplement
ajouté :
- Le général Walters a appelé, ainsi que le bureau du Secrétaire
Brinston.
J’ai à nouveau levé le regard. Il me dévisageait,
avec reconnaissance et amusement. Et un superbe sourire auquel je n’ai
pu que répondre. Il a dit, simplement :
- Merci Mary.
Puis il est retourné travailler. Mais à le voir s’éloigner, c’était comme si soudain un poids énorme s’était envolé des épaules si chargées de cet homme.
Jack O’Neill n’a en effet rien à faire dans ce milieu, vous dirait-on. Moi, je vous répondrais qu’au contraire heureusement qu’il est là. Pour parler franchement à un Président à qui les autres ne font que des courbettes. Pour prendre les bonnes décisions au bon moment. Pour expliquer à tous ces bureaucrates ce que risquent les hommes dont ils parlent comme des numéros. Pour taper du poing sur la table quand un comptable trop zélé parle de faire des coupes franches dans le budget (pharaonique mais hélas nécessaire) du SGC.
Heureusement qu’il est là, en bras de chemise derrière son bureau (un peu mieux rangé, je n’en suis pas peu fière), à incendier des politiciens en des termes jaffas que, bien heureusement, il est seul ici à comprendre.
Il est venu à la maison.
C’était un de ces affreux week-ends où il apprend au dernier
moment qu’il ne pourra pas quitter Washington et où il finit la
journée du vendredi à tourner comme un lion en cage dans son bureau.
Il ne me parle pas quand il est dans cet état là. Pour me préserver,
parce qu’il sait que la colère, l’agacement, l’emporteraient
sur tout. Je l’ai compris, et plus que jamais j’essaye d’anticiper
ses moindres désirs, ses moindres exigences. Pour lui éviter par
exemple d’envoyer un téléphone contre le mur comme l’avant-dernière
fois.
C’est encore pire quand le SGC est en alerte. Il reste alors parfaitement
immobile, assis à son bureau, les coudes posés sur la surface
boisée, et il attend le coup de téléphone fatidique. Je
ne lui passe alors personne. Je ne vais pas le voir. Il ne m’aperçoit,
ne m’entend même pas. J’attends, moi aussi, de l’autre
côté de la porte, que la voix du sergent Harriman ou du général
Landry retentisse enfin avec cette pointe de soulagement qui annonce que nous
sommes encore passés à deux doigts d’une terrible catastrophe.
Puis, à la fin du coup de fil, Jack sort de son bureau, un sourire fatigué
sur ses lèvres fines, et me demande invariablement :
- Mary, je vais nous chercher un petit café ?
Bref, un vendredi où le ciel
était gris, où il avait appris qu’il devrait rester sur
Washington pour rencontrer un obscur politicien qu’il haïssait d’avance,
je lui ai simplement demandé :
- Jack, voulez-vous venir dîner ?
Il a levé les yeux vers moi, surpris :
- Dîner ?
- Oui, chez moi, avec Frank (c’est mon mari). Je serais ravi de vous avoir,
et je peux sans vantardise affirmer que je suis meilleure cuisinière
que ce fast-food où vous allez encore aller.
Il a semblé réfléchir,
hésiter, puis devant mon air décidé, a répondu en
souriant :
- Avec plaisir. Mais promettez- moi de ne pas faire de folies ! Un plat de pâtes
ou une pizza suffiraient très bien à mon bonheur !
- Ne vous inquiétez pas, rien de formel là dedans. Franck sera
ravi de connaître enfin le patron dont je lui rebats les oreilles depuis
des mois.
J’étais ravie. Je savais
que le dîner se passerait parfaitement bien, que Jack serait un convive
charmant.
Franck, par contre, était paniqué :
- Par… Pardon ?? LE Jack O’Neill ? Ton patron ?? Le héros
aux affections top secret et tout ?
- Lui-même. Ce soir, à vingt heures.
- Mais…. Et c’est maintenant que tu me le dis !!
- C’est maintenant que je viens de l’inviter.
- Merveilleux. Et qu’est-ce que je vais dire, moi, à un type pareil
??
- Tu verras, vous avez plein de choses en commun.
- Mouai….
Jack est arrivé parfaitement
à l’heure (quand il veut !), avec un superbe bouquet de fleurs
pour moi et une bouteille de vieux whisky pour Franck. Immédiatement,
ce dernier a été conquis. Moi aussi : Jack en pantalon de toile
beige et chemise noire, ça vaut le détour….
Bref, je n’ai quasiment pas pu en placer une de la soirée. Ils
ont parlé pêche, cinéma, politique même, dans une
ambiance parfaitement détendue. Ils ont bu une bière en préparant
le barbecue. J’ai même réussi à extorquer à
Jack sa fameuse recette d’omelette.
La soirée a été délicieuse. Deux autres ont suivi
depuis.
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Ce matin, alors qu’il regardait des clichés de la Porte des Étoiles
en activité (des interférences étaient soient disant apparues
dans le vortex…..), j’observais moi aussi les photos par-dessus
son épaule, fascinée par cette vague d’un bleu intense qui
représente tant. Il a souri, et a demandé le plus tranquillement
du monde :
- Vous voulez la voir ?
- La voir ? Comment cela ?
- La Porte ? Vous aimeriez la voir ?
- Bien sûr, comme tout le monde, mais…
- Bien, alors allons-y.
Je suis restée muette. Son
sourire s’est élargi à voir ma tête. Il a enchaîné
:
- Je dois rentrer dès aujourd’hui à Colorado Springs, je
dois être présent pour plusieurs remises de médailles qui
auront lieu au SGC. Voulez-vous m’accompagner ?
- Mais…. Bien sûr…. Mais comment justifier….
- … que je vous emmène ? Vous êtes une excellente assistante
qui a su se rendre absolument INDISPENSABLE.
- Même pour une remise de médaille ?
- Et à qui vais-je dicter mon discours dans l’avion ?
- Vous ne faites jamais de discours. A peine trois mots de félicitations.
- On ne sait jamais, l’inspiration pourrait venir, ce serait dommage que
vous ratiez cela !
J’ai ri, il a souri. J’ai
appelé Franck pour le prévenir que je serais absente trois jours,
jusqu’à lundi. Il a feint d’être désolé,
mais je sais qu’à peine le téléphone raccroché
il a appelé Dan pour organiser un poker.
Et maintenant je suis confortablement installée dans un Falcon mis à
disposition par le Pentagone, et je vole vers le Colorado en compagnie d’un
des plus grands héros de notre Histoire.
Nous atterrissons sur la base de
Denver où une voiture est bien entendu venue nous chercher. Nous rallions
le SGC.
L’entrée dans la base est impressionnante. Nous passons un nombre
étonnant de postes de garde. Et à chaque fois ce sont les mêmes
sourires qui accueillent Jack. Il leur répond à tous, demande
des nouvelles, plaisante. Il est chez lui. Et tellement heureux d’y être.
Nous arrivons à un premier
ascenseur, longtemps après avoir pénétré dans les
profondeurs de Cheyenne Mountain. Je ne demande rien, j’observe. Il me
regarde du coin de l’œil, amusé. Nous changeons d’ascenseur
et descendons à nouveau, loin, très loin sous terre. Je ne suis
pas claustrophobe, heureusement.
Les lourdes portes s’ouvrent et trois sourires nous accueillent.
Celui, si doux, du colonel Carter.
Même en pantalon de treillis elle est ravissante.
Celui, radieux, d’un bel homme encore jeune. D’un geste automatique,
il remonte les petites lunettes qui agrandissent ses yeux d’un bleu limpide.
Celui, à peine ébauché et pourtant si chaleureux, d’une
armoire à glace au front décoré d’un symbole jaffa
coulé à l’or fin.
SG1, avant.
Le regard de Jack passe sur ses
trois anciens coéquipiers. Le Docteur Jackson soupire :
- On avait pourtant payé très cher pour être débarrassé
de vous. Toute la base s’était cotisée.
Le colonel Carter rit. Teal’C hausse un sourcil et répond d’une
voix calme :
- Je n’ai personnellement pas participé à une telle collecte.
Nous sortons de l’ascenseur.
Jack fait les présentations :
- Mary, vous connaissez déjà le colonel Carter, voici Teal’C,
et enfin Daniel Jackson, que je vous demanderai d’appeler Space Monkey,
il adore cela.
- Ah ah, très drôle, raille l’intéressé.
Je serre la main à chacun, impressionnée malgré moi. Le
docteur Jackson me demande :
- Alors vous êtes la pauvre victime sacrificielle abandonnée au
despotisme de ce général mal embouché ?
- Voilà, mais je n’ai pour l’instant pas à me plaindre
du despote.
L’archéologue me regarde, faussement surpris :
- Jack, vous l’avez payée encore plus cher que nous n’avions
payé pour nous débarrasser de vous, à ce que je vois.
- Daniel, vous nous excuserez, mais Mary et moi avons du travail, contrairement
à vous notre temps est précieux.
Sans plus s’inquiéter de la mine déconfite de son meilleur
ami, Jack se tourne alors vers le colonel et demande doucement :
- C’est bon vers sept heures ? Je ne devrais pas en avoir pour longtemps
avec Landry, mais je veux passer voir Walter et Cameron, Siler aussi….
Bref, faire un petit tour….
Elle sourit, elle comprend. Elle acquiesce simplement :
- Sept heures, parfait.
Je me retourne vers Jack et demande
:
- Si vous pouviez juste m’indiquer un hôtel, que je puisse….
- Vous plaisantez ? Il est hors de question que vous dormiez à l’hôtel,
vous êtes mon hôte pour ces trois jours !
- Mais….
- Rhhhhhhhhhhhhhhhha !
Nous sourions tous les quatre. Comme d’habitude, je capitule. Je vais donc passer le week-end chez le général O’Neill. Et dîner avec SG1, d’après ce que j’ai compris.
Alors que nous nous dirigeons vers
le bureau du général Landry, je murmure :
- Donc, si j’ai bien saisi, il y a plus de huit mois, vous m’avez
embauchée moi parce que j’ai fait quelques années d’étude
d’archéologie et que je vous rappelle un colosse extraterrestre
de type afro-américain ?
Il sourit et répond calmement.
- Voilà. Avouez que mes critères de sélection étaient
excellents.
Que voulez-vous répondre à cela ?
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Il me présente tout le monde. Le colonel Mitchell (ils recrutent les
équipes SG dans des agences de mannequins ou quoi ?), Siler, Harriman
et enfin le général Landry.
Ils sont tous charmants, ravis de
le voir. Pour eux, il n’est pas un général de Washington,
mais restera toujours le leader de la plus extraordinaire des équipes
SG. Le général O’Neill n’éclipsera jamais le
colonel O’Neill. Tout le monde ici garde le souvenir du soldat, du héros
charismatique et simple à la fois.
Jack O’Neill ne sera jamais un bureaucrate dans un bel uniforme d’apparat,
mais restera le colonel souriant, son P90 à la main, sa casquette sur
la tête, comme il aime lui-même à se retrouver sur la photo
posée dans son bureau.
- Tu permets Hank ? La dame ne l’a
jamais vue.
- Mais je t’en prie.
Jack, avec son petit sourire de
gamin, me fait signe de le suivre. Nous sortons du bureau de Landry par une
autre porte et nous retrouvons dans la salle de briefing où le sort du
monde s’est joué bien plus souvent que dans le Bureau Ovale.
Nous nous avançons vers la vitre. Elle est là, un peu en contrebas.
Encore plus imposante que tout ce que j’avais imaginé. Des techniciens,
des militaires s’affairent autour d’elle. C’est leur quotidien,
et pourtant on lit dans tous leurs gestes comme une révérence
sacrée, un respect infini pour tout ce que cet objet représente.
Jack la regarde aussi, immobile à mes côtés. Il a cette
ombre de nostalgie dans le brun de ses yeux. Elle lui manque. Beaucoup de choses,
de gestes, de gens lui manquent quand il n’est pas ici.
Il finit par se détourner
en disant :
- Je vous laisse, je retourne discuter avec Hank. Je vous préviens, on
peut y passer des heures.
- Je m’en doute.
Il s’éloigne et je reste seule à contempler cette empreinte unique d’un passé tellement lointain et d’un futur déjà présent.
Je ne bouge pas quand quelqu’un
entre dans la pièce. Le docteur Jackson vient à son tour se placer
à mes côtés. Il murmure :
- Je vous préviens, on peut y passer des heures.
Je souris.
- On me l’a déjà dit.
- Jack ?
- Oui.
A cet instant une sirène
retentit. Je lève les yeux, un peu inquiète, mais le sourire de
l’archéologue me rassure instantanément :
- C’est juste SG3 qui rentre de mission.
- L’équipe du colonel Reynolds ?
- Tout à fait.
Et soudain l’énorme cercle de naquadah se met en branle. Je ne peux détacher mon regard des symboles qui tournent à vitesse constante, s’arrêtent, repartent. Des chevrons qui s’enclenchent un à un dans un bruit mat et illuminent petit à petit le contour de l’anneau. Le dernier vient de s’enclencher et, l’iris ayant été ouvert, la vague bleutée envahit la rampe d’accès.
Je me suis reculée d’un pas.
Ce spectacle est magique. Comme un lac vertical ouvert sur l’infini. La surface, d’un bleu électrique, intense, miroite doucement, semble presque vivre, palpiter.
Puis 3 hommes et une femme émergent
du vortex, descendant tranquillement la rampe. Je n’arrive pas à
réaliser qu’ils reviennent à l’instant de l’autre
bout de l’univers. L’un d’eux s’étire, lève
les yeux puis salue le Docteur Jackson d’un sourire. Celui-ci répond
d’un geste de main, tout en m’expliquant :
- C’est Reynolds, justement.
- Ah.
La Porte se referme. J’arrive
enfin à en détacher mon regard, et me tourne :
- Docteur Jackson…
- Daniel, s’il vous plaît.
Je souris. Ils sont tous beaux et gentils ici !
- Bien. Alors Daniel, ne pensez-vous pas que je devrais plutôt loger au
SGC ou dans un hôtel ? J’ai peur de déranger Jack chez lui.
- Vous ne le dérangerez pas. S’il cela ne lui faisait pas plaisir,
il ne vous l’aurait jamais proposé.
- C’est vrai.
Il me regarde avec un mélange
d’amusement et de curiosité. Puis enchaîne :
- Il ne tarit pas d’éloge sur vous, ce qui est en soi un exploit
extraordinaire. On n’aurait jamais imaginé qu’il puisse s’entendre
avec quelqu’un là-bas.
- Avant lui, je ne m’étais jamais aussi bien entendu avec un patron
moi aussi.
- Avec Jack, c’est toujours…. Ou tout l’un ou tout l’autre.
On le déteste ou on l’adore. Il n’est supportable que pour
ceux qui l’aiment.
- Et tout le monde ne l’aime pas ?
- Ici, au SGC, si. Parce qu’on sait tous ce qu’on lui doit, ce dont
il est capable. Mais ailleurs, je ne pense pas. Il en dérange plus d’un.
Ce qui est sûr, c’est qu’il ne laisse jamais indifférent.
- Ça, c’est certain.
- Il faut juste…. Comprendre certaines choses.
- Comme le fait qu’il ne faut pas lui parler le matin avant son double
café noir sans sucre.
Daniel me regarde, souriant franchement.
Une question me brûle les lèvres depuis des mois, je ne sais toujours
pas si j’ai le droit de la poser. Je jette un coup d’œil derrière
moi, Jack est toujours avec Landry. Je me lance et demande :
- Je voudrais savoir…. Comment est mort son fils, Charly ?
Le sourire de Daniel s’efface soudain de son si doux visage. Il se tourne
à nouveau vers la Porte des Etoiles, puis répond dans un souffle
:
- C’était un horrible accident. Il s’est tué avec
l’arme de service de Jack.
Je ferme les yeux alors qu’une
douleur sourde enserre soudain mon cœur. Je ne dis rien. Daniel continue,
d’une voix très douce et empreinte d’une immense souffrance
:
- Jack ne s’en est jamais remis. Nous nous sommes connus lors de la première
mission sur Abydos. Il en était le chef. C’était juste après
la mort de Charly, tout se qu’il attendait de cette mission, c’était
d’en finir à son tour.
- Et ?
- Et il s’est accordé une nouvelle chance. Nous avons été
nombreux à en profiter. Je pense qu’il ne l’a pas regretté.
- Merci de m’avoir dit cela. Je comprends mieux, je crois, certains silences
chez lui.
Daniel ne répond pas. Mais quand il se tourne à nouveau vers moi,
son sourire est revenu :
- On se revoit pour le dîner Mary ?
- Avec plaisir.
Quelle force de caractère habite cet homme, pour que dans une telle douleur il ait puisé la force de consacrer sa vie aux autres ?
L’après-midi se finit déjà. Après une visite du SGC par le meilleur guide que je pouvais espérer, nous reprenons la voiture et nous dirigeons vers Colorado Springs.
Le soleil est déjà
bas sur l’horizon quand Jack gare dans l’allée le 4X4 qu’il
a retrouvé avec bonheur sur le parking du SGC.
La maison est superbe. Elle donne l’impression de n’être qu’en
bois et verre, spacieuse, lumineuse sûrement. Le jardin qui l’entoure
est très simple, peu de fleurs, beaucoup d’herbe et d’arbres.
On se croirait presque à la campagne à quelques minutes du centre
ville.
Jack prend nos deux sacs de voyage dans le coffre et me laisse passer devant
lui. Nous montons les quelques marches qui mènent à la porte d’entrée,
qui s’ouvre immédiatement.
Le colonel Carter nous accueille en souriant, à présent vêtue
d’un simple jean et d’une chemise blanche aux manches remontées
sur ses bras fins. Elle a pris une douche, quelques petits cheveux encore humides
collent à son front. Elle est radieuse.
- Alors, le SGC vous a plu ?
- C’est passionnant, dis-je en entrant. On ne se rend pas compte tant
qu’on ne l’a pas vu.
Elle acquiesce. Jack m’a suivie avec les sacs et se contente de déposer
un baiser rapide sur la tempe de la jeune femme. Il lui demande avec une voix
d’une douceur infinie :
- Pas trop fatiguée ? Tu as eu le temps de tout faire ou tu veux que
je….
- Non non, ça va, tout est prêt pour ce soir, la chambre de Madame
Matheson aussi.
Je corrige :
- Mary, s’il vous plaît.
- Bien, alors Sam, répond-elle en souriant.
Jack me précède dans le couloir, la chambre d’amis est au
rez-de-chaussée. Elle est spacieuse, simple, très claire, et tout
à fait confortable.
- Si vous voulez vous changer, n’hésitez pas. Mettez vous à
votre aise, c’est ce que je vais faire moi-même.
- Merci beaucoup, je vais suivre votre conseil.
Non pas que j’en ai assez de mon tailleur, mais surtout parce qu’il
me semble important de les laisser quelques minutes seuls…
Jack sourit et ressort en fermant la porte.
J’enfile un pantalon de lin
et un pull léger.
Je ne suis pas surprise qu’elle soit là, qu’elle habite là.
Depuis qu’elle est passée au Pentagone cela me semblait évident.
Je les admire juste d’arriver à rester si parfaitement professionnels
à l’extérieur.
Bon, dix minutes, ça devrait suffire, non ?
Je ressors de la chambre. En arrivant dans l’entrée je les vois descendre l’escalier. Jack est à présent en jean lui aussi, avec un t-shirt beige. Et un sourire à la fois radieux et tranquille.
Il me fait les honneurs de la maison. Elle est superbe en effet, très grande, à la fois moderne et chaleureuse. Il y a beaucoup de photos aux murs : Charly, Daniel, Teal’C, Jack et Sam, le général Hammond, un homme et une femme que je suppose être les parents de Sam, un homme plus jeune avec femme et enfants (un frère ? une sœur ?)…. Et la collection intégrale des DVD des Simpsons. Jack en est très fier.
Nous nous installons à peine
au salon quand on frappe à nouveau. Daniel Jackson et Teal’C font
leur entrée, un pack de bières et un gâteau à la
main.
La soirée est délicieuse. Je suis à la fois impressionnée
et parfaitement à l’aise. Ils sont d’une gentillesse incroyable,
tous les quatre. Jack et Daniel se chamaillent à longueur de temps. Teal’C
est très impressionné par mon lever de sourcil qui a valu à
Sam un fou rire monumental. Ils parlent du SGC, un peu, pas trop. Ils en parlent
comme d’un travail normal, habituel. Avec humilité et simplicité.
Ils sont très prévenants, les uns avec les autres, et tous avec
moi. Je leur raconte un peu de ma vie, de notre vie au Pentagone, tâchant
de les faire rire par quelques anecdotes sur Jack. Celui-ci acquiesce en souriant
à mes récits.
La nuit tombe peu à peu sur le jardin. Nous venons de finir le dessert, Jack et Sam sont partis préparer le café. Je suis en pleine discussion avec Daniel sur mes lointaines études d’archéologie quand nous entendons Jack rire depuis la cuisine.
Je m’interromps. C’est
si étrange de l’entendre rire en fait. Sourire, blaguer, oui, souvent.
Mais rire, jamais. Le rire de Sam répond au sien, cristallin, spontané.
Mon regard s’est tourné un instant vers la porte fermée.
Quand je repose les yeux sur Daniel et Teal’C, ils m’observent en
souriant. L’archéologue répond doucement à ma pensée
:
- C’est étrange hein ? Je ne l’avais jamais entendu rire
en huit ans en fait. Jusqu’à ce qu’il quitte enfin le SGC.
- Vous voulez dire, qu’avant….. ?
Teal’C secoue la tête en souriant. Daniel enchaîne :
- Et non. Professionnels jusqu’au bout.
- Alors que cela faisait longtemps qu’ils étaient attirés
l’un par l’autre ?
L’archéologue rit :
- Pour ce qui est de la simple attirance, je pense qu’elle date du jour
où ils se sont rencontrés. Pour ce qui est du reste, je pense
que c’est venu peu après en fait. On a des grands débats
là-dessus.
- O’Neill et le colonel Carter ne le savent pas eux-mêmes, ajoute
le jaffa de sa voix calme, mais leurs sentiments datent de nombreuses années.
Je reste sans voix. Je n’arrive
pas à réaliser, à mesurer ce qu’ils ont du endurer.
Ils ont combattu pendant si longtemps aux côtés l’un de l’autre,
frôlé la mort, risqué de tout perdre, et pourtant ils ont
attendu d’être libérés de tout cela pour être
enfin ensemble. Je demande :
- Et ils sont ensemble… ?
- Depuis le jour où Jack a eu le papier d’affectation pour le Pentagone,
c'est-à-dire le jour où il a été remplacé
par Landry à la tête du SGC.
- Le jour où il n’a plus été le supérieur
direct du colonel, ajoute Teal’C.
Nous nous regardons en silence. Les deux hommes sourient devant mon air effaré. A ce moment, Jack et Sam sortent de la cuisine avec le café.
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Il est tard à présent. Daniel et Teal’C viennent de repartir.
Je sors du cabinet de toilette et ouvre la porte de ma chambre quand mes yeux
s’attardent sur le miroir qui surplombe la tablette de l’entrée,
au bout du couloir.
Ils sont debout dans le salon, tous les deux, dans la pénombre. Très
doucement, Jack passe la main sur la joue de la jeune femme qui ferme les yeux
sous cette caresse. Ils se regardent à nouveau, avec une totale sérénité.
Puis Sam glisse ses doigts dans les cheveux grisonnants, se hausse très
légèrement sur la pointe des pieds, et dépose sur les lèvres
fines du général O’Neill le plus doux des baisers.
Ils se séparent. Jack sourit, prend la main de la jeune femme dans la
sienne et leur reflet disparaît. Je les entends monter rapidement l’escalier,
puis une porte se referme.
C’est très étrange.
Je n’arrive pas à réaliser que ces quatre personnes sont
celles qui, à tant de reprises, ont sauvé le monde. Ils sont si
simples. Ils partagent un dîner tranquillement, discutant de tout et de
rien comme tout un chacun, blaguant, riant.
Et en même temps c’est une évidence que cela ne peut être
qu’eux. Sans cette simplicité, cette complicité, ils n’auraient
justement pas pu accomplir de tels exploits. C’est ce lien unique qui
les unit qui nous a sauvés tant de fois. L’alchimie rare et précieuse
et ces quatre êtres hors du commun.
Et je mesure la chance inouïe que j’ai, moi, d’en être le témoin.
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Ce week-end a été
parfait. Nous avons assisté le samedi à la remise de médailles
au SGC, puis sommes allés nous balader avec Daniel, Teal’C et Cameron
Mitchell. Jack et Sam nous ont laissés ensuite, soit disant pour faire
quelques courses. Que ce soit ça ou autre chose, qu’importe. Personne
n’a fait aucun commentaire.
Le dimanche avait été consacré à un grand pique-nique
dans le parc, mais s’est fini par un thé improvisé devant
un feu de cheminée quand des trombes d’eau se sont mises à
tomber.
Nous sommes repartis tard le dimanche. Je comprends à présent
encore mieux que devoir rester à Washington le week-end lui brise autant
le cœur, quand ce sont des moments si agréables qu’il rate.
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Nous sommes à présent lundi matin, 3 mois après ce fameux
week-end. Dès qu’il est entré j’ai vu que quelque
chose n’allait pas. Il est nerveux, se passe constamment la main dans
les cheveux, sourit les yeux dans le vague, puis fait tourner son stylo dans
ses doigts, ou tapote la surface de son bureau.
Bref, pas concentré du tout sur le dossier qu’il a sous le nez
et qu’il doit pourtant me rendre signé dans maintenant….
15 minutes.
Je ne demande rien. Je sais qu’il ne faut pas. S’il a quelque chose à dire, il le dira.
Et en effet, au moment où
je rentre déposer sur une table un nouveau rapport, il dit doucement,
presque pour lui-même :
- J’ai 52 ans.
- Et moi 53 Jack. Je vous bats.
- Sommes-nous vieux ?
Heureusement que c’est lui. Je ne sais pas si j’apprécierais
la remarque de n’importe qui.
- Non. Le sous-secrétaire Wimley, lui, est vieux. Et il n’a pas
40 ans.
Jack sourit, absent.
- C’est vrai. Mais…. Ne suis-je pas trop vieux pour certaines choses
?... Enfin…. Je veux dire…..
Il se tait.
Oulà !!!! Une conversation psychologico philosophique avec Jack, je n’avais
jamais essayé encore. Restons simples :
- Pour quelle chose par exemple ?
Il ne me regarde pas. Il s’est
retourné et fixe un point dans le parc derrière la baie vitrée.
Je vois la tension dans les muscles de sa mâchoire. Il hésite.
Il ouvre la bouche, la referme. Puis murmure enfin dans un souffle :
- Pour avoir un enfant.
J’ai failli hurler de joie,
mais je ne bouge pas. Seul me trahirait mon sourire béat, mais il ne
peut le voir. Ma voix est parfaitement calme quand je réponds :
- Alors non Jack. A mon avis vous n’êtes pas du tout trop vieux
pour avoir un enfant, et vous ferez un merveilleux père.
Il ne répond rien, se contente
d’acquiescer, mais je lis son sourire dans le pli léger sur sa
joue. Je m’éloigne, et au moment de quitter le bureau, je l’appelle
doucement :
- Jack ?
Il se retourne, machinalement. Nos
regards se croisent. Pour la première fois, je lis comme de la peur dans
le sien. Je lui souris et dis :
- Toutes mes félicitations.
Un instant il ne bouge pas. Puis
un sourire se dessine sur ses traits et une lueur nouvelle et magnifique éclaire
le brun de ses yeux. Il répond :
- Merci Mary.
Je sors du bureau. La signature attendra, en fait.
FIN
Je tuerais pour des commentaires.
lol